Depuis le festival de l’info locale
C’est l’éternelle question que se posent tous les responsables de médias locaux : comment toucher le jeune public ? Très loin des « pages jeunes » souvent un peu cheap que tentent de proposer quelques titres, voici trois exemples très différents, présentés lors du Festival de l’info locale : Fritz (avec Emilie Mendonça), Les P’tits drôles (avec Pierre-Yves Crochet) et Chiche ! (avec Hélène Lopes).
Fritz, la revue pour les ados à Tours
Le produit : un magazine de 8 pages pour les pré-ados et ados de l’agglomération, expliquant l’actu locale ou nationale.
Le ton : les mots qui, à nous adultes, font sens, ne parlent pas aux ados (10/14 ans). Il ne faut pas non plus faire comme si on parlait comme un jeune… Cela a aussi joué pour la mise en page, que l’on a dû adapter car elle était trop enfantine au départ. On a fait un gros travail de refonte avec plus de photos et moins d’illustrations.
Toucher le public cible : on démarche les écoles primaires, par des visites, l’envoi d’exemplaires gratuits. Mais la personne qui décide de s’abonner, c’est la maman ou le papa. On a donc le double problème de la visibilité et ensuite de l’acte d’abonnement.
Et l’actu locale ? Il est difficilement séparable de faire de l’actu nationale. On veut leur donner les clés pour comprendre le monde. On a deux pages 100% locales avec un agenda, un portrait de quelqu’un du coin, plus un dossier en lien avec l’actu nationale mais des interlocuteurs locaux, et enfin un mix de local, national ou international sur deux autres pages. C’est une manière de montrer que ce qui se passe dans le monde a souvent des origines ou des incidences chez nous.
Quel modèle économique ? On avait fait le choix de ne pas avoir de pub, mais, aujourd’hui, face à une diffusion qui diminue (vente comme abonnement), on basculera à Noël en format gratuit, financé par l’EMI (éducation aux médias). On répartira nos contenus entre le papier (qui passera de 8 à 4 pages) et le web, qui sera une vitrine.
Podcast « Les p’tits drôles » (Sud Ouest)
Le but : conter des histoires, via des podcasts, en lien avec l’actualité, la culture ou l’environnement.
Le ton : il faut être synthétique, ludique, leur faire apprendre des choses sans qu’ils n’aient l’impression de la faire. Il suffit d’ajouter quelques blagues, des sons, des pirouettes pour rendre l’écriture plus vivante. On a un message à transmettre, il faut le rendre plus rigolo. Et on réussit de mieux en mieux au fil des épisodes.
Toucher le public cible : il faut convaincre les parents avant d’obtenir les enfants. Notre podcast est souvent utilisé dans la voiture, lors des départs en vacances… Nous avons la chance d’être appuyé par la marque Sud Ouest, qui est le vecteur parfait vers les parents.
L’audience : on est à 52000 écoutes, soit des personnes qui ont dépassé le 30% du podcast. C’est de l’audience qualitative. Et on a fait de très bons chiffres en première saison, car Deezer nous a classé comme podcast idéal pour écouter en voiture. Ce fut un très gros coup de pouce…
Et l’actu locale ? A la première saison, on était dans le très local (la marine). Pour la dernière, sur l’environnement, on est partis de l’universel pour aller au local.
Quel intérêt pour le groupe ? L’idée c’est de toucher les parents qui ont entre 25 et 45 ans, ce qui permet aussi de rajeunir notre lectorat classique. Le but est donc de rajeunir l’image de la marque. Et ça passer aussi par nos réseaux sociaux propres, d’Insta à Tiktok.
Le modèle économique :cette série de podcast est un test pour faire de l’info differemment, en ciblant un public différent. Pour chaque épisode, j’ai besoin de trois jours minimum, entre la documentation, l’écriture, l’enregistrement et le montage. Je suis employé de Sud Ouest, mais cette activité déborde largement le temps qu’on m’octroie le groupe. Et c’est clair : je suis supporté par un groupe, donc cela est amorti. Par contre, en indépendant, j’aurais arrêté depuis longtemps… D’autant plus que le podcast n’est pas parrainé.é
Chiche ! (magazine municipal édité par la ville de Saint-Nazaire)
Le but : informer les enfants (6/10 ans) de la ville sur l’actualité locale, la culture locale et la fierté d’appartenance à cette cité.
Le ton : le public peut paraître réduit, mais parler aux 6 ans, ce n’est pas pareil qu’aux 10 ans. D’où la difficulté pour nous dans Chiche ! Alors, on travaille sur le vocabulaire, pour qu’il soit rigolo, sans être simpliste. On travaille sur les jeux, le dessin. Enfin, pour l’éditorial classique, on travaille beaucoup sur l’illustration, en variant beaucoup les styles pour attraper l’attention en fonction des goûts.
Toucher le public cible : on met le magazine dans le cartable ! On livre les classes directement, en s’appuyant sur le personnel qui travaille dans les écoles. Mais on dépend aussi des professeurs qui jouent le jeu à 95%.
L’audience : on sait qu’on arrive à le mettre dans les mains des enfants, mais difficile de quantifier le taux de lecture. On propose aux enfants d’envoyer par mail les dessins ou réponse aux jeux, et les retours sont en progression, ce qui est encourageant.
Et l’actu locale ? on est un magazine de Saint-Nazaire, et on veut les ouvrir sur leur ville, en les emmenant dans des quartiers qu’ils ne fréquentent pas, avec des équipements (sportifs, culturels…) qu’ils pourraient utiliser. L’objectif est de vraiment faire grandir de manière positive ces enfants de la ville.
Quel intérêt pour la ville ? L’objectif premier n’est pas d’informer les enfants sur la politique de la ville. On veut que le journal soit partagé en famille, par exemple pour l’apprentissage de la lecture. Au delà, si un sujet permet en plus de toucher les parents, de leur apprendre quelque chose, c’est encore mieux !