Journalisme et politique, différentes visions de la mission démocratique

Après les élections européennes du 9 juin, une étude de Tagaday, plateforme française de veille média, interroge. Elle indique que Jordan Bardella a bénéficié d'une surmédiatisation entre entre le 1er juin et le 7 juin. Si les titres de PHR n'y participent pas directement, tous ne traitent pas de la même façon l'actualité du parti d'extrême droite.

Journalisme et politique, différentes visions de la mission démocratique

Après les élections européennes du 9 juin, une étude de Tagaday, plateforme française de veille média, interroge. Elle indique que Jordan Bardella a bénéficié d'une surmédiatisation entre entre le 1er juin et le 7 juin. Si les titres de PHR n'y participent pas directement, tous ne traitent pas de la même façon l'actualité du parti d'extrême droite.
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Montpellier résiste au RN ». Ce jeudi 13 juin, le titre de Une de La Gazette de Montpellier est assumé par son directeur, Jean-Baptiste Decroix. « On parle du Rassemblement national (RN) comme on en a toujours parlé. On est un média de gauche, on ne se cache pas. Le RN ce n’est pas pour nous et ça ne le sera jamais. » À Montpellier, les élections européennes du 9 juin ont confirmé l’ancrage historique à gauche. Avec 24 % des suffrages, c’est la liste de Manon Aubry (LFI) qui est arrivée en tête. Le RN quant à lui, a réalisé un score de 16,7 %.

Après la victoire de la liste menée par Jordan Bardella aux élections européennes, une étude de Tagaday, plateforme française de veille média, a fait du bruit. Ouest-France a publié cette étude qui revient sur l’exposition médiatique des candidats aux élections européennes entre le 1er mai et le 7 juin 2024. Au total, 5 400 programmes d’information diffusés à la télé et à la radio, ainsi que 3 000 publications de presse écrite ont été passés au crible. Avec 24 188 mentions, Jordan Bardella apparaît comme le candidat le plus médiatisé.

Mais pour Jean-Baptiste Decroix, il n’est pas pertinent de mélanger la médiatisation du parti par les chaînes d’information en continu et par les titres de presse hebdomadaire régionale (PHR). « Certains pourraient se dire que parler de ce parti, c’est faire leur pub. Mais mettre leur ascension sous le tapis n’est pas la solution. Et la PHR, comme d’autres médias, apporte du recul sur l’information et permet d’analyser et de décrypter ces résultats. »

De 2002 à 2024, les Unes changent

En 22 ans, les articles des titres de PHR au sujet du RN ont évolué autant que le score du parti d’extrême droite. Philippe Cornaton, rédacteur en chef adjoint de La Voix de l’Ain, se souvient : « En 2002, lorsque Jean-Marie Le Pen est arrivé au second tour des élections présidentielles, le journal a pris position. La Une incitait à faire barrage à l’extrême droite. »

Mais serait-il possible que le journal ait le même visage avant les prochaines élections législatives ? L’intéressé en doute. « À cette époque on appartenait encore à l’Église. Aujourd’hui, peut-être que la rédaction pourrait discuter d’un tel engagement mais il faudrait l’accord du nouveau propriétaire, Sogemedia. »

La normalisation de l’extrême droite en question

Au sein du groupe Nord Littoral, les candidats RN et LFI sont traités sur un même pied d’égalité. « On considère les votes à l’extrême droite et à l’extrême gauche comme des votes protestataires, explique Frédéric Petronio, directeur des publications du groupe Nord Littoral. On ne peut pas faire comme si ça n’existait pas. L’important, c’est que nous ne devons pas nous positionner en faveur d’une famille politique ou nous laisser porter par nos sympathies. »

Un traitement autrefois questionné quant à la normalisation de l’extrême droite. « La banalisation est derrière nous, estime Frédéric Petronio. Ce n’est plus la question depuis deux ou trois élections. On se doit de couvrir les moments forts de la vie démocratique, donc on suit Emmanuel Macron lorsqu’il vote au Touquet, de la même façon qu’on suit Marine Le Pen lorsqu’elle vote à Hénin-Beaumont. »

Un travail de décryptage

Même son de cloche du côté de La Voix de l’Ain, qui a vu un député RN être élu pour la première fois dans le département en 2022. « À partir du moment où une formation politique a des élus au sein des collectivités locales et à l’Assemblée, c’est un parti comme un autre, si on met de côté les idées », concède Philippe Cornaton.

« On est là pour faire entendre ce qu’il se passe. » 

Frédéric Petronio, directeur des publications du groupe Nord Littoral

Pour ce dernier, les journalistes n’ont pas à donner des consignes de vote. Mais il insiste quant à l’importance du temps long et de l’analyse. D’autant plus qu’à Gex, l’une des communes couvertes par La Voix de l’Ain, le score du RN a augmenté de dix points de pourcentage le 9 juin, par rapport à 2019. « On essaie de sortir des contenus pédagogiques, qui décryptent les résultats, en expliquant que le RN a lissé son discours, détaille le rédacteur en chef adjoint. On rappelle notamment que l’insécurité se limite à quelques vols sur notre territoire. »

En fonction des lignes éditoriales, de l’histoire des journaux et de la direction de chaque titre, le traitement des sujets politiques qui concernent le Rassemblement national diffère. Mais tous se rejoignent sur un même point énoncé par Frédéric Petronio : « On est là pour faire entendre ce qu’il se passe. »

Nathéo Dillenseger

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