Face à l’IA, les rédactions de presse locale entre craintes et expériences (1/4)

À l'occasion d'un séminaire de trois jours sur l'intelligence artificielle à l'ESJ Lille, Thierry Watine a présenté son "tour de France" de l'IA dans les rédactions. Dans certains titres de presse locale, la phase de test est plus qu'entamée.

Face à l’IA, les rédactions de presse locale entre craintes et expériences (1/4)

À l'occasion d'un séminaire de trois jours sur l'intelligence artificielle à l'ESJ Lille, Thierry Watine a présenté son "tour de France" de l'IA dans les rédactions. Dans certains titres de presse locale, la phase de test est plus qu'entamée.

La technologie divise les journalistes », constate Thierry Watine, directeur du Projet med-IA et professeur à l’université Laval au Québec. Mercredi 15 novembre, il présentait aux étudiants de l’ESJ Lille, son « tour de France de l’intelligence artificielle dans les rédactions », à l’occasion d’un séminaire de trois jours sur l’IA.

Parmi la dizaine de rédactions qui l’ont accueilli, six sont des titres quotidiens régionaux. Si Thierry Watine s’interroge encore sur la possibilité que « les robots puissent effectuer une partie du boulot journalistique », c’est déjà une réalité dans plusieurs titres de presse locale.

Mais les rédactions ne sont pas suffisamment prêtes à laisser la main, selon l’enquête de Thierry Watine. Il classe en trois groupes distincts, les trente journalistes qui ont accepté de témoigner auprès de lui.

D’abord, il qualifie de « méfiants » la moitié d’entre eux, qui insistent sur la déontologie et le droit. Les « pionniers », qui admirent cet outil, constituent un tiers de son échantillon. Enfin, il nomme « réfractaires » les cinq journalistes qui rejettent tout recours à l’IA.

Nouvelle technologie, nouvelles craintes

Dans le groupe EBRA, toutes les rédactions utilisent l’intelligence artificielle lors d’élections. C’est également le cas chez Ouest-France depuis 2014. Mais le recours à l’IA s’accélère. En octobre dernier, L’Est républicain et Vosges Matin, annonçaient tester ChatGPT, pour la correction et la relecture des articles (une décision finalement suspendue -mais pas abandonnée- à l’issue d’un conseil économique et social de l’entreprise). Ouest-France, expérimente l’IA pour les résumés d’articles.
 
 
 
 
 
 
 
 
Thierry Watine.

D’est en ouest, l’IA s’installe

Lors d’un CSE extraordinaire, Rue89Lyon rapporte que la direction du groupe Ebra a annoncé des tests de ChatGPT à partir du 22 novembre à Nancy, pour l’édition de Lunéville.

Une expérience qui durera trois mois, dont deux feront l’objet d’une analyse par un expert. Réclamé par les syndicats, il devra présenter les conséquences de cette expérimentation. Celle-ci ne devrait concerner que la relecture d’articles de correspondants.

Pour autant les doutes persistent, surtout au sujet de l’encadrement de ces pratiques et du respect de l’éthique journalistique. Thierry Watine relève également un « problème de temporalité », entre la lenteur du droit et de l’éthique, et l’IA qui « galope ».

Dans ce sens, le directeur général de Ouest-France, Fabrice Bazard, a déclaré « éviter l’utilisation de licences gratuites de ChatGPT, trop perméables et peu sécurisées », dans un entretien à The media leader.

Pour répondre à ces questionnements, l’ONG Reporters sans frontières (RSF) et l’Alliance de la presse d’information générale (APIG) lancent le Projet Spinoza. L’objectif est de créer un outil d’IA dédié aux journalistes. Ce dernier s’appuiera sur la Charte de Paris sur l’intelligence artificielle, publiée par RSF et 16 autres organisations, le 10 novembre dernier.

Nathéo Dillenseger

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