Cent. Le chiffre est tout aussi symbolique que les mauvaises relations entre le quotidien régional la Voix du Nord et la mairie RN d’Hénin-Beaumont. Dans la presse locale, il est courant que les liens entre la mairie et la rédaction du quotidien ou de l’hebdo du coin soient parfois un peu fraîches. Mais dans le bourg nordiste, le coup de froid dure depuis longtemps. Exactement depuis 2014, les élections municipales et l’arrivée de Steeve Briois dans le fauteuil du maire.
Et très vite après ce changement, le ton a changé. A tel point que la communication entre la ville et la rédaction -ou plutôt les pages du journal- se réalise en grande partie à travers les droits de réponse écrits par la mairie, que le quotidien n’a d’autre choix que de les publier. Des droits de réponse qui atteignent un triste record cet automne, puisque le centième vient donc d’intégrer les colonnes de la Voix du Nord il y a quelques jours.
La Revue des Médias, éditée par l’INA (Institut national de l’audiovisuel) vient de publier ce lundi 18 octobre un long et très documenté article sur les relations plus que tumultueuses entre la rédaction locale et la mairie. Mathieu Deslandes revient longuement sur les origines du conflit, l’enlisement actuel de la situation, les pressions ou mesures de rétorsion et le recours ad nauseam aux droits de réponse. « C’est extrêmement économique, explique-t-on du côté de l’hôtel-de-ville. Pour 5,55 euros, je publie ce que je veux dans La Voix du Nord. » Bien plus économique qu’un encart pub, pourrait-on dire ironiquement. Mais il n’est pas sûr que les créateurs de ce dispositif juridique (dans la loi sur la liberté de la presse en 1881) en apprécieraient un telle utilisation…
Le droit de réponse, en quelques mots
Prévu à l’article 13 de la loi du 29 juillet 1881 sur la presse, le droit de réponse doit permettre à toute personne physique ou morale citée dans un article de presse de donner sa version des faits (ce qu’elle a déjà en théorie pu faire avant parution, le journaliste lui ayant normalement demandé son opinion sur le sujet traité…) Il n’est pas nécessaire, comme on le croit souvent, que la personne soit diffamée ou mise en cause dans l’article. Cela peut être un moyen de donner un complément d’information, une rectification, une explication supplémentaire. Et la publication se retrouve dans l’obligation de le diffuser, sauf si le droit de réponse est contraire à l’ordre public, aux bonnes mœurs ou, bien sûr, aux lois. Toutefois, pour éviter les abus et les tribunes, la jurisprudence a statué plusieurs fois en faveur des titres qui refusaient de les insérer. Un recours devant les tribunaux forcément long et très couteux pour un média de proximité.