Dans les locaux de La Croix du Nord à Lille, l’approche journalistique a bien changé depuis l’arrivée en 2017 de Nicolas Demollien. L’actuel rédacteur en chef a amené avec lui les codes et la cadence du pureplayer Actu.fr. Sur le web, sous le nom “LilleActu”, les journalistes de l’hebdomadaire nordiste touchent chaque mois des centaines de milliers de lecteurs, avec un ton neutre, factuel et dénué de tout propos religieux. La Croix du Nord (autrefois détenu en partie par la famille Mulliez) ne vit plus exclusivement des actualités du diocèse.
Mais dans sa version papier, le journal lillois maintient encore et toujours des pages dédiées à la vie religieuse de son territoire. “On a une journaliste dédiée à ces pages-là, explique le rédacteur en chef. La couverture peut être très variée, mais c’est la spécificité de notre journal. On tente plutôt de faire des sujets de fonds, des vrais reportages que du praticopratique religieux.” Une spécificité qui maintient l’économie de l’hebdomadaire selon Nicolas Demollien. Tiré à 11 000 exemplaires en vue de conserver la diffusion des annonces légales, La Croix du Nord conserve un lectorat religieux, encore adepte de l’actualité paroissiale. “Les pages chrétiennes, on ne veut pas et on ne peut pas les enlever. C’est ce qui fait l’essence de notre version papier, je suis persuadé que nos abonnés du journal le lisent et sont fidèles grâce à cette spécificité« , développe le rédacteur en chef.
Des convictions et des impératifs économiques
Un traitement religieux indispensable à la pérennité du journal, c’est également ce que révèle Jean-Baptiste de Guébriant, directeur de publication du groupe indépendant Edit Ouest (Le Courrier de la Mayenne, Haut-Anjou et L’Echo d’Ancenis). “Le dernier sondage auprès de nos abonnés papiers dévoile que près de 83 % ne lisent pas la version web de nos hebdomadaires -site hébergé par Actu.fr NDLR-. Je suis peut-être vieux jeu, mais je crois en l’avenir de la presse papier. Donc si on veut garder notre diffusion papier, on maintient notre ligne éditoriale catholique.” Au contraire de La Croix du Nord qui persévère dans l’actualité religieuse principalement pour des questions économiques, Edit Ouest affirme défendre une ligne éditoriale conservatrice et traditionnelle, “de droite”, comme l’énonce Jean-Baptiste de Guébriant.
« On cherche encore une balance entre l’offre gratuite sur internet et maintenir notre groupe indépendant par la diffusion papier et sa ligne conservatrice.»
Jean-Baptiste de Guébriant, directeur de publication d’Edit France
Comme beaucoup d’autres journaux locaux, les hebdomadaires d’Edit Ouest n’ont “jamais connu une aussi grande audience” depuis leur implantation sur le web, tel que le décrit leur directeur de publication. Mais, revers de la médaille, le nombre d’abonnés et la vente au numéro ne font que chuter. La faute à quoi ? A un ligne éditoriale trop conservatrice ? “Non” pour Jean-Baptiste de Guébriant. La réponse se trouve selon ce dernier dans la gratuité des contenus postés sur le web. “ Je suis pas convaincu que les gens soient encore prêts à payer pour acheter de l’info sur internet. Nous, on a fait le choix d’attirer des annonceurs sur le web en créant de l’audience, car on en perd sur la version papier.” Pour Edit Ouest, près de 60 % du chiffre d’affaires proviennent encore de la diffusion papier. “On cherche encore une balance entre l’offre gratuite sur internet et maintenir notre groupe indépendant par la diffusion papier et sa ligne conservatrice. Moi, j’y crois à cet équilibre financier”, conclut Jean-Baptiste de Guébriant.