Comment résister à la manipulation de l’information ?

Quel avenir pour le journalisme face aux plateformes numériques ? Comment faire survivre la réalité dans une mer de fake news ? Comment sauver les médias français ? Quelques pistes et réponses énoncées lors des Assises du journalisme.

Comment résister à la manipulation de l’information ?

Quel avenir pour le journalisme face aux plateformes numériques ? Comment faire survivre la réalité dans une mer de fake news ? Comment sauver les médias français ? Quelques pistes et réponses énoncées lors des Assises du journalisme.

Les temps sont troubles pour les médias, face à la dérégulation imposée par les réseaux sociaux ou les plateformes qui s’affranchissent des notions d’éthique, et sur lesquels les algorithmes favorisent les fake news aux dépens des informations vérifiées… L’Agora des 18e Assises du journalisme de Tours tentait de trouver des solutions à ce défi énorme, ce mercredi 12 mars.Quelques pistes de solutions en verbatim…

• David Colon (enseignant chercheur)
« Nos adversaires veulent nous entraîner sur le terrain du pluralisme interne : accuser un média d’être gauchiste, par exemple. Travaillons sur le pluralisme externe : il faut créer une alternative,un média social européen d’utilité sociale. Mais le poids du lobbying américain et chinois est énorme.  Et puis les politiques ont peur leur positionnement en faveur de ce média d’intérêt général, se retourne contre eux. Un algorithme transparent, un modèle ne reposant pas sur la publicité… c’est une priorité. »

• Sophie Taille-Polian (députée)
« Les citoyens engagés sont nombreux. Et leur combat, au-delà des divisions partisanes, rencontrent un écho. Je ne sais pas si une plateforme alternative menée par une fondation est réaliste, mais il faut faire quelque chose. Il faut une réponse face à la menace de la démocratie par des autocraties.
Il faut aussi promouvoir des espaces publics sains. La TNT ne l’est pas aujourd’hui. Des canaux ne respectent pas les cahiers des charges. La TNT est organisée, entretenue par la puissance publique. Cela devrait être un espace sûr, de qualité… Cet espèce a une légitimité forte et devrait être protégée… »

• Peter Limburg (directeur de Deutsche Welle)
« L’idée d’un réseau social européen semble difficile, car ces plateformes travaillent sur l’émotion et le divertissement. Mais est-on capable de ça ? J’ai peur que ça ressemble à une plateforme du type Arte, qui est bien, mais qui ne touche que 5% du public…
La solution est d’être dur en matière de régulation. Il faut être dur, car la géopolitique nous incite à aller de l’avant. On est l’Europe, on est plus forts qu’eux, ne soyons pas peureux… »

• Leila de Comarmond (société des journalistes Le Parisien)
« La baisse de la diffusion ne date pas de l’apparition des plateformes. Il faut récupérer la confiance des lecteurs. Et puisque la publicité ne rapporte pas autant, misons sur les abonnements ! Le premier enjeu, vis-à-vis des lecteurs, c’est la transparence. Notamment sur la réalité du média, du capital, des garanties d’indépendance du titre… Autre enjeu : imposer une personnalité juridique des rédactions. Quel enjeu peuvent avoir les journalistes au sein du conseil d’administration ? Il faut protéger aussi le directeur de la rédaction aux yeux de l’actionnaire… »

• Sébastien Montaigu (adjoint au délégué à la régulation des plateformes numériques DGMIC)
« Il faut que chaque utilisateur de plateforme soit exposé une diversité de points de vue, au lieu qu’il ne soit unique. Il faut une Europe forte qui applique les textes, les infractions sont fortes, notamment en matière de détournement ou manipulation des algorithmes… Il faut des réactions… »

• Thibaut Bruttin (Reporters sans frontières)
« Il y a un risque réel : que le journalisme devienne comme le jazz ! C’est cool, mais ça ne touche pas grand monde ! Il faut éviter la monopolisation par certains secteurs et une pluralité dans le débat public. Cela nécessite un accès transparent aux technologies, entres autres. Il faut un “label” sur le journalisme, qui ne garantisse pas la qualité, mais qui donne une explication sur la manière de travailler. Et que le journalisme soit favorisé par les algorithmes… Mais aujourd’hui, la commission européenne ne semble pas réagir, ce qui risque de détruire sa crédibilité au sujet de l’espace informationnel… Enfin, il faut mettre des barrières à cet espace pour valoriser le produit de qualité. »

• François-Xavier Lefranc (président du directoire de Ouest France)
« Il faut mener une bataille farouche et cruelle pour le respect du droit. Il faut le faire collectivement, par exemple au sein de l’Alliance. La bataille coûte cher mais il ne faut pas oublier de le faire. Il faut aussi que les médias aient les moyens de faire leur travail, que les journalistes puissent travailler en respectant la déontologie  Il y a dans le monde des pays qui rêvent d’un monde ou de pays sans journalistes… Prenons-en garde… »

Propos recueillis par Laurent Brunel

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