L’arrivée d’Ouest-France sur Twitch est une réflexion menée depuis pas mal de temps. On avait commencé à préparer le sujet en septembre. C’est notamment la raison de mon poste. » Loup Lassinat-Foubert est social media manager pour Ouest-France. Il définit les stratégies de communication en ligne du quotidien et supervise le développement de contenus natifs et projets vidéo en ligne. « C’était une manière très intéressante de travailler une horizontalité avec les lecteurs et une notion de proximité », précise le journaliste.
Twitch est une plateforme américaine initialement lancée en 2011 pour diffuser des parties de jeux vidéo. Plus tard, plusieurs catégories ont été ouvertes telles que la musique, la cuisine et les talk-shows. En créant sa chaîne, Ouest-France est venu chercher de l’interaction : « Sur les réseaux sociaux traditionnels, c’est un peu trop descendant. Les utilisateurs oublient que derrière les articles et les publications, il y a des gens qui travaillent. » La relation entre le lecteur et le journaliste s’est déshumanisée. À l’inverse de ces réseaux impersonnels, « Twitch apporte une discussion rapprochée entre eux. Par son principe, la plateforme fait fructifier ce lien. »
Un contenu par et pour le public
Pour cela, le quotidien tente de réaliser des interviews, des rencontres pour favoriser les échanges avec les abonnés. « Les questions des utilisateurs sont parfois aussi intéressantes que pourraient l’être celles d’un professionnel. » Cette interactivité permet de placer le lecteur comme acteur de l’information et d’humaniser d’autant plus le journal. « Il faut chercher la synergie entre le média et le spectateur. On essaye d’avoir au maximum des invités. »
Pour les choisir, les journalistes se concertent pour décider de la personne qui serait la plus pertinente à convier sur la plateforme. « Certaines célébrités sont plus difficiles que d’autres à contacter. Mais en tout cas, il n’y a pas eu de refus net. C’est plus de la curiosité qui se fait ressentir autour de ce qu’est Twitch. Samuel Étienne a permis de démocratiser un peu plus cela. » Les rencontres ne seront pas l’unique point sur lequel le média compte se baser. « L’axe de la culture et du sport correspond aux goûts des utilisateurs, affirme Loup Lassinat-Foubert, on vient également de lancer la rubrique gaming à Ouest-France. » Un hasard du calendrier qui tombe à pic pour réaliser des directs sur une plateforme historiquement liée aux jeux vidéo.
“À Rome, fais comme les Romains”
L’arrivée sur Twitch ne peut pas se faire sans connaître l’environnement de celle-ci. « C’est beaucoup de travail, d’investissement et de coordination entre les équipes, rapporte Loup Lassinat-Foubert, on regarde et apprend en fonction de ce qui a du succès ou pas. Mais il était sûr qu’on n’allait pas démarrer avec un sujet de politique internationale. » Le souhait d’Ouest-France était donc de produire de l’information qui pourrait toucher plus facilement les utilisateurs de la plateforme. « Le destinataire de ce contenu est le lecteur. Il faut adapter la thématique. Comme on dit à Rome, fais comme les Romains. »
L’intégration dans le paysage de Twitch semble réussie : le public est à chaque fois plus nombreux au rendez-vous. Loup Lassinat-Foubert le constate à chaque direct qu’il lance : « On a des habitués de Twitch qui regardent le direct, mais aussi des personnes qui sont moins initiées, arrivées après que Samuel Étienne se soit lancé dessus. » Certains utilisateurs, en revanche, sont contre l’apparition des médias sur Twitch. Loup Lassinat-Foubert en est le témoin : « On est constamment confronté à ce genre de public. On a démarré en février, après le premier live de BFM TV. Nous avons eu quelques retours et amalgames négatifs comme “On ne veut pas de la télé ici”, sauf que nous sommes de la presse papier (rires) ».
Dans son ensemble, le journaliste relativise et se montre plutôt satisfait de ce lancement : « On a eu le droit à un accueil très favorable. J’ai toujours un œil sur le tchat, je modère un message par stream, ce qui est très peu ! On préfère se concentrer sur les spectateurs bienveillants, qui viennent de plus en plus régulièrement. »