Les entreprises de presse et Google
• Pierre Petillault (directeur de l’Alliance de la presse d’information générale) : « Le trafic de nos sites via Google représente deux tiers du trafic. On est à 6% pour les réseaux sociaux. La dynamique est donc vraiment du côté de Google et de Discover… Alors, non, les médias ne peuvent pas se passer des big tech, contrairement à ce que disent certains acteurs politiques. On vit avec cette dépendance, et les stratégies des éditeurs sont plutôt orientées vers le référencement…
• Cécile Dubois, présidente du SPIIL (Syndicat de la presse d’information indépendante en ligne) : »Avant Discover, on avait un trafic “stable”. Discover, au contraire, booste le trafic. Pour un éditeur, c’est important, et il faut donc investir pour comprendre et y être. C’est parfois compliqué pour un petit média… C’est donc à la fois stratégique et discriminant. «
• Pierre Pétillault : « Il y a une dépendance dans l’accès à l’audience, mais en lien avec le marché publicitaire. C’est de là que vient en fait cette dépendance, vu que presque toutes les entreprises de presse dépendent de cette publicité. »
• Cécile Dubois : « Avant, pour communiquer, il fallait passer par un média. Aujourd’hui, chacun peut communiquer directement, ce qui réduit notre attractivité. »
• Pierre Petillault : « on attaque aujourd’hui des rediscussions avec Google pour les droits voisins. On est plutôt confiants, mais rien n’est encore signé. On devra faire de même avec Méta. Par contre, pas de vrais négociations avec Microsoft, ou X-Twitter, qui dit ne pas être concerné par les droits voisins… »
Les médias et les réseaux sociaux
Depuis ces dernières années, les algoryhmes des réseaux sociaux ont changé et ne priorisent plus les médias, locaux ou non.
• Cécile Dubois : « Si on veut être présents sur tous les réseaux, c’est rarement possible. Seuls les plus gros médias peuvent le faire. La dégringolade de Facebook dit le désinvestissement de ce réseau dans les médias. Ce réseau a-t-il réellement besoin de la presse pour fonctionner ? Avec les histoires des gens et la publicité, cela semble lui suffire… »
• Pierre Petillault : « Il y a une vraie montée en force des plateformes vidéos. Le Monde, comme le Parisien, s’adaptent. Mais il ne faudrait pas que les petits médias se laissent distancer. Ensuite, il y a une question sur la place de l’écrit. Peut-on informer aussi bien avec une vidéo de deux minutes qu’avec un papier de 5000 signes ? Enfin, il y a un problème de régulation, l’écrit et l’image ne le sont pas de la même façon. Est-ce que cela entraînera une réécriture de la loi de 1881 ? »
• Cécile Dubois : « La convergence me parait inéluctable. Et nous nous battons pour que certains sites vidéos soient reconnus comme sites d’info. Attention toutefois aux influenceurs d’actu qui ne diffusent que sur les réseaux sociaux. Il faudra peut -être également un jour qu’ils le fassent sur d’autres supports. »
• Pierre Petillault : « On est en pleine dépendance, c’est clair, et certains ont développé des tires plus accrocheurs, pour récupérer du trafic… «
• Cécile Dubois : « la proposition du dégroupage des algorithmes est une solution. Cela permettrait de ne plus être totalement dépendant des réseaux, en redonnant du pouvoir dans les mains des utilisateurs. C’est une des propositions des Etats généraux de l’information particulièrement importante. «
L’IA et la prodcution d’information
• Pierre Pétillault : « il y a un risque, demain, ce soit l’IA qui gère en direct l’information… Mais pour alimenter une IA générative, il faut des contenus fiables. Donc, les acteurs de la tech doivent avoir besoin de ces contenus. Notre responsabilité, c’est d’assurer une info de qualité, vérifiée. C’est ce qui fait la force de nos médias et entreprises. Ce n’est pas le problème de la tech. »
• Cécile Dubois : « Pour l’instant, en effet, pour la production d’information, il faut un journaliste qui aille au contact de son sujet. Et l’IA ne sait pas faire ça…C’est sans aucun doute notre chance… »