Le montage vidéo : « On est passé de Gutenberg à Mark Zuckerberg »

La vidéo est devenue à part entière en PHR. Sauf que le montage est un travail de longue haleine. Pour remédier à cela, les méthodes divergent : vidéos courtes et filmées d’un trait, faire appel à un monteur…

Le montage vidéo : « On est passé de Gutenberg à Mark Zuckerberg »

La vidéo est devenue à part entière en PHR. Sauf que le montage est un travail de longue haleine. Pour remédier à cela, les méthodes divergent : vidéos courtes et filmées d’un trait, faire appel à un monteur…

A l’hebdomadaire La Presse d’Armor basé à Paimpol (Bretagne), la vidéo est l’affaire de chacun. Il n’y a pas de monteur désigné. Un fonctionnement que l’on retrouve dans la plupart des journaux du groupe Publihebdos. « Ici chacun fait une vidéo de temps à autre sur le terrain et s’occupe ensuite du montage, quand il faut en faire un », explique Nathalie Bot-Jaffray, journaliste à La Presse d’Armor.

Mais par manque de temps, les trois journalistes de la petite rédaction essaient plutôt de favoriser les vidéos très courtes, filmées d’un trait. « Il est assez rare qu’on fasse un montage avec plusieurs séquences. Il m’est déjà arrivé d’utiliser MovieMaker, mais j’ai appris sur le tas de mon côté », ajoute Nathalie Bot-Jaffray.

Le journal a sa chaîne YouTube depuis trois ans et les journalistes y publient des vidéos d’une durée variant entre 30 secondes et 2 minutes. Elles viennent souvent alimenter une actualité forte comme le Tour de France, la visite d’un ministre, des inondations ou encore des élections municipales. En revanche, elles viennent plus rarement compléter des sujets plus légers publiés sur le site web.

« Nous ne sommes pas trop actifs en vidéo pour plusieurs raisons, mais nous manquons principalement de temps. En hebdo, on a déjà tellement de choses à gérer en même temps, on joue sur tous les tableaux », rapporte Annick Guillemot, journaliste à La Presse d’Armor. « Mais c’est aussi une question de réflexe et de technique. Nous n’avons pas démarré le métier avec ça et il est donc parfois difficile de s’y mettre réellement. Les formations sur smartphone ont été instructives, toutefois deux jours ne suffisent pas toujours pour intégrer pleinement tous les procédés. »

La vidéo, cela ne s’improvise pas

Du côté de Sogemedia, cela se passe différemment. Les formations commencent à arriver mais « il y a toujours des journalistes qui envoient des vidéos à monter ». C’est ce qu’affirme Jimmy Hautecloche, le responsable de l’agence web Cross Media Consulting, qui a pour principal client le groupe de presse. « Je dirige une équipe pour l’instant de trois personnes : deux développeurs et un informaticien. »

Journaliste de formation, « longtemps sur le terrain en PHR », il s’occupe, en partie, du montage des reportages vidéo des journalistes. « Une vidéo, on ne la fait pas comme ça, lance Jimmy Hautecloche. Il faut y réfléchir avant. Et après, quand on envoie les rushs au monteur, il faut nous donner des instructions : c’est ce qu’on appelle un conducteur. On fait aussi des choix mais plus il y a d’indications, plus c’est précis et plus c’est découpé avant, plus c’est simple. » 

Parfois, cela lui arrive de passer des coups de téléphone pour demander au journaliste s’il peut refaire des vidéos. Autre situation extrêmement rare à laquelle il a pu être confronté : « J’ai dû jeter des rushs parce que le son et l’image n’allaient pas, voire même le sujet n’avait pas d’intérêt, insiste le monteur. La vidéo doit se justifier parce que certains sujets ne sont pas visuels. Cela se construit, tout comme les articles. »

Sur le territoire de l’Oise, Jimmy Hautecloche est sollicité entre deux à cinq fois par semaine, en plus des sujets qu’il fait de son côté. « Je mets entre deux à quatre heures pour faire un reportage d’1 min 30 à 3 minutes. Il faut pouvoir aller vite. » Quant au Nord, « les deux monteurs doivent être entre cinq à dix chacun », révèle-t-il.

La PHR au défi de la vidéo

En tant qu’ancien journaliste, cela peut l’embêter d’avoir des images de mauvaise qualité. « Le journaliste a peut-être l’image la plus pourrie du monde mais s’il a un crash de voiture et que c’est flou ou pixelisé, on va la passer quand même parce que c’est le choc des vidéos. » Cela fait penser à BFM témoin pour Jimmy Hautecloche.

Toutefois, il a quand même conscience des moyens qui existent en PHR. « Il faut faire avec ce qu’on a, les journalistes font un canard mais en plus, on leur demande de faire des vidéos et de faire du web. Tout ça, ce n’est pas simple », glisse-t-il. Pour lui, il existe quand même une solution : mutualiser. « Quand les journalistes vont en reportage, ils peuvent filmer leur interview. Et cela peut servir pour avoir une base écrite. »

Le monde de la presse a quand même connu de nombreuses évolutions. Il faut réussir à s’adapter. « C’est assez impressionnant parce que certains journalistes ont commencé à travailler sur des machines à écrire, puis l’ordinateur. C’est hallucinant parce que nous, on en a vu passer des changements mais pas à ce point-là, lâche Jimmy Hautecloche. On est passé de Gutenberg à Mark Zuckerberg. »

Le reportage vidéo est donc devenu un élément important pour la PHR. « On doit à la fois filmer, donc on réfléchit à l’image, mais aussi aux questions à poser et on pense au montage en même temps. Aujourd’hui, c’est devenu une logique compliquée mais c’est aussi un défi palpitant. »

Aglaé Kupferlé et Hugo Sergeant

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